Des dangers de la pensée unique (Boris Cyrulnik)

« Depuis le lycée, j’ai toujours été réticent aux théories qui mènent au pouvoir, qu’elles soient politiques, culturelles ou scientifiques. Je suis angoissé par ceux qui se soumettent à leurs certitudes; je les crois capables de tout, du pire évidemment comme pour les camps d’extermination, les lobotomies ou l’exclusion sociale. Les réciteurs m’inquiètent et j’aime les douteurs qui mettent des questions à la place des conclusions. L’évolution des idées est une preuve de vitalité, le fixisme témoigne de leur pétrification. »

Boris Cyrulnik – Les âmes blessées – Odile Jacob (2014)

A callarse – Se taire (Pablo Neruda)

Ahora contaremos doce
y nos quedamos todos quietos.

Por una vez sobre la tierra
no hablemos en ningún idioma,
por un segundo detengámonos,
no movamos tanto los brazos.

Sería un minuto fragante,
sin prisa, sin locomotoras,
todos estaríamos juntos
en una inquietud instantánea.

Los pescadores del mar frío
no harían daño a las ballenas
y el trabajador de la sal
miraría sus manos rotas.

Los que preparan guerras verdes,
guerras de gas, guerras de fuego,
victorias sin sobrevivientes,
se pondrían un traje puro
y andarían con sus hermanos
por la sombra, sin hacer nada.

No se confunda lo que quiero
con la inacción definitiva:
la vida es solo lo que se hace,
no quiero nada con la muerte.

Si no pudimos ser unánimes
moviendo tanto nuestras vidas,
tal vez no hacer nada una vez,
tal vez un gran silencio pueda
interrumpir esta tristeza,
este no entendernos jamás
y amenazarnos con la muerte,
tal vez la tierra nos enseñe
cuando todo parece muerto
y luego todo estaba vivo.

Ahora contaré hasta doce
y tu te callas y me voy.

Extrait du recueil « Extravagario » (« Vaguedivague » dans la traduction française)

Relisons Simone Weil

Encore un extrait d’une oeuvre majeure de Simone Weil, la philosophe et la militante : « Réflexions sur la cause de la liberté et de l’oppression sociale » et une invitation à relire le texte dans sa totalité !

Ce texte écrit après les manifestations de février 1934 est resté inédit jusqu’en 1955. Bien sûr, le texte est marqué par son époque et le contexte socio-politique de 1934 n’est pas celui d’aujourd’hui (encore que …). La jeune philosophe de 25 ans s’y montre particulièrement lucide et pertinente dans son analyse et certaines de ses affirmations peuvent encore s’appliquer à notre époque. Alain, son maître en philosophie, dit de l’essai que « c’est un travail de première grandeur ».

« La période présente est de celles où tout ce qui semble normalement constituer une raison de vivre s’évanouit, où l’on doit, sous peine de sombrer dans le désarroi ou l’inconscience, tout remettre en question.

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La démocratie peut-elle produire des lois liberticides ?

Oui ! nous disait Simone Weil en 1933 (aussi l’année de l’arrivée d’Hitler au pouvoir).

« Sous tous les noms dont il peut se parer,  fascisme, démocratie ou dictature du prolétariat, l’ennemi capital reste l’appareil administratif, policier et militaire. Non pas celui d’en face, (…) mais celui qui se dit notre défenseur et fait de nous des esclaves ».

Cité par Jacques Julliard : Le choc Simone Weil (2014)